Boom ! Un ange, Yoyo, vient de franchir l’amour du son… Ses collègues : Hey « L’asticot » ! Tu nous refous le son ? J’adoooore !
Le son ? Son dada, un cheval fou de bataille, qu’il console. Sans bruit et d’une main ferme il maîtrise la bride de l’onde ; tout cela sans besoin d’aérateurs transtympaniques.
Yohan Bicherel n’est pas né à Carentan -son âge- en Manche, que nenni, il débarque pourtant en Normandie au grand jour, à Rouen, pas n’importe comment. Élu « plus beau bébé 1984 » de la cité, une fierté de sa maman ; les 2000 francs de gagnés lui permirent de mettre du beurre dans les épinards du petit dont l’ouïe est déjà aux aguets, toutes les cloches de la ville aux « cent églises » tintinnabulent.
Yo ne sort pas d’une école mais de plusieurs. D’abord, formation M.A.O, musique assistée par ordinateur ; il n’aima pas. Puis, instruction au backline, gestion des instruments des musiciens sur scène ; il n’aima pas. Ensuite, Radio France, stage, l’émission, bof ! Le dernier jour, concert de « Air » (groupe French Touch), il s’exerce à la régie « face et retour ». Et puis, encore backline, au Canada pas pour n’importe qui, les Beach Boys, le Creedence Clearwater Revival. Pas fan des grosses productions, Yo, avec un Contrat de volontaire Européen, rejoint un ami à Amsterdam. Il bosse au P60, salle de concerts gérée par une asso, un Chabada au pays plat, pour un maigre salaire compensé par la bouffe du midi et soirs de concerts ; logé aussi. Sa chambre ? Une singularité sise dans un établissement scolaire.
“Pour moi seul, j’avais un classe de 100 m2 pour lit et, parfois, pour jouer au foot avec mes 3 collègues, tous de pays différents, j’avais dans la vingtaine“.
Un apprenti sur le tas, donc, à une époque où la console analogique moins complexe à utiliser que la numérique, était de mise. Le début, le plateau, installation du matos pour les musicos (câbles, micros et tout le tintouin). La suite vint naturellement : la totale, « retour » et « face » (Envoi du son exclusif aux musiciens et musiciennes des premières parties et la façade réservée à la bonne entente avec le public). C’est un signe, « splitter », donc séparé. D’après l’Asticot, il est possible de faire les deux en un, possible mais lourd et chronophage lorsque moult groupes, pas le temps. Le « retour » demande une fusion des regards, des artistes sur scène et des équipes techniques, « œil pour œil » : « je le dis toujours aux stagiaires, regard fixe ! » –
Vision floue parfois à cause des « vilains » technos de la loupiote. Leurs flashs obligent le geste des mains, exemple : lever le doigt pour augmenter le son. Si lumière en pleine tronche, Yohan met des lunettes de soleil, rigolo le Yoyo.
Hésitation, « Canada le retour » pour retrouver les potes, boulot assuré par un « Permis Travail Vacances » en poche, ou rester aux Pays-Bas (petite copine). La barrière de la langue ne lui promet que de l’intermittence. Encore en formation à Issoudun, un régisseur général du « File 7 » (SMAC du 77), le prend sous son aile. « tu as 15 jours pour venir !».
Ok. Après ce 1er CDI signé, Yo remonte au Nord. Là-bas il y a des corons, d’un sommet il aperçoit Le Chabada et postule. Le 1er sept 2022 il intègre la chouette équipe (dixit Yoyo), le foot ! Petit reproche aux SMAC et à certains tourneurs ; leurs productions, sans être au Zénith, sont trop grosses pour Yo. « Je préfère les petits concerts intimistes des sales salles.»
Pourquoi pas la lumière ? : « La lumière c’est chiant, faut toujours porter des trucs. Sérieux, je n’ai pas le côté « peintre » nécessaire pour éclairer et l’affinité avec le son m’est grande ».
Son taf actuel n’est pas une contrainte, Yo appartient à une chic équipe, on s’y poile et tout le monde donne la « patte à l’autre ». Moins fun, l’accueil des « stars » qui brillent qu’entre elles (techniciens, manager, régisseur…), font la tronche, voire s’engueulent, cela arrive parfois seulement et heureusement. Lorsque l’artiste arrive avec ses propres techniciens, Yo soutient et aide en mettant à dispo le matos du Chab’ et en expliquant son fonctionnement : « C’est où le bouton qui… ? ».
Plus éprouvant, « Sors tes Covers » ; un événement intense ; une semaine de résidence avec le groupe principal et une dizaine d’autres à gérer sur scène, changements de plateaux fréquents en peu de temps, deux minutes. Yo s’en sort.
Gratteux plus jeune, dans différents groupes, il aime toujours « chatouiller les basses » ! Homme de ménage, aussi, il nettoie la scène, éponge les bières renversées. Le gars n’est pas plus sportif que cela. Quelques brasses en piscine du coin et coups de pédales de vélo pour se rendre au boulot -ahi ! Aho !- lui suffisent pour améliorer son souffle mis à mal par un handicap. À chacun ses goûts, en bon ouvrier de la sonorité, Yo aurait plutôt un penchant pour le Rock Industriel (Stoner, Sludge) ; Fu Manchu et Amenra, histoire de vous filer ses tuyaux.
Ouvrir un bar-concert basique, son rêve dans lequel traînent ses souvenirs de fréquentation avec les potes en ce genre de troquets à Rouen, « Le Bateau Ivre », « l’Emporium Galerium », voire le nec plus ultra, « le Brooklyn » devenu centre commercial (beurk). « C’est dans ces lieux un peu dégueux que j’ai grandi aussi bien humainement que musicalement ». Sûr, vue la pugnacité de son beau personnage, son rêve sera rêvé. Il y finira sa vie -comme il le dit-.
Yohan prendra son envol vers celui-ci en ce mois. Bon vent Yo ! Et j’arrête là le son…
Yohan © Ange
Photos et Rédaction : Gérard Prudhomme dit « Ange »
Gérard est passionné de photographie, d’écriture et il pratique également de la danse libre et du théâtre d’improvisation, sans oublier la marche et les musiques, toutes, presque, pas féru d’opéras et d’autant plus d’opérettes. Ça va pour l’instant, le Chabada ne donne pas dans le genre…
