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Zenzile : Conçu pour durer

Crédit photo: David Gallard

Crédit photo: David Gallard

Zenzile est de retour. Avec une nouvelle chanteuse qui ne marchait sans doute pas encore lorsque le groupe s’ est créé il y a 22 ans. Depuis, les Angevins mènent leur carrière comme ils l’entendent, sans se soucier de ce qu’on attend d’eux et avec le besoin perpétuel d’évoluer pour ne jamais s’ennuyer. Et c’est sans doute pour ça qu’ils nous sont devenus si indispensables. Rencontre avec Vincent Erdeven (claviers, guitares) pour connaître les contours de ce nouvel « Eléments ».

Avez-vous décidé que ce nouvel album aurait une déclinaison multi-media sur scène avant ou après sa composition?

Avant même de commencer la composition de ce disque, on savait qu’on voulait associer l’image et une certaine réflexion sur les lumières à nos concerts. On a déjà l’expérience de deux ciné-concerts, donc on commence à bien maîtriser l’apport des images pour construire un univers, mais on ne voulait pas se laisser enfermer dans une narration. On sait que notre musique est assez «cinématique», on voulait donc créer une sorte d’atmosphère avec les vidéos et le travail de notre éclairagiste qui irait dans le même sens. Mais cette décision n’a pas influencé notre mode de composition. On a gardé les mêmes méthodes de travail que par le passé, même si on a bricolé avec la vidéo assez tôt dans le processus. On s’est finalement retrouvés avec une quinzaine de titres exploitables pour le live, qu’on a testés sur scène pour la première fois au Quai l’été dernier en sortie de résidence. Et on en a sélectionné neuf, qu’on a un peu réarrangés, pour le disque «Éléments». On a également retravaillé l’ordre des morceaux pour le disque -et finalement pour la scène aussi- pour que ça raconte une histoire, qu’il y ait une meilleure harmonie entre les ambiances du disque.

Du coup, est-ce que ça veut dire que pour la tournée qui va venir, vous ne jouerez que ces nouveaux morceaux?

On jouera tout l’album + deux inédits qu’on a travaillés avec Zakia, c’est sûr. Mais on va aussi intégrer d’anciens instrumentaux tirés de précédents disques, parce qu’on nous les demandera. On est justement en train de réfléchir là-dessus en ce moment. Pour savoir si on les intègre au cours de la setlist, ou bien si on les met en bloc à la fin. Julien Brevet, qui bosse sur les vidéos pour «Éléments», et Stéphanie, notre éclairagiste, ont déjà des idées pour intégrer des images sur les vieux morceaux, donc il y a a priori moyen de rendre le tout assez cohérent.

Une nouvelle chanteuse, Zakia, intègre le groupe pour ce disque. Comment l’avez-vous connue?

On la connaît depuis toujours en fait. On est très amis avec ses parents, qui ont tous les deux joué avec Zenzile à un moment ou à un autre. Un soir, son père m’a fait écouter le groupe de musique electro de Zakia et j’avais trouvé qu’elle avait une super voix. Au départ de ce disque, on pensait être parti pour faire un disque instrumental. Au fur et à mesure de la composition, certains morceaux appelaient quand même des voix. Pour certains, je m’y suis collé, pour un autre, c’est Matthieu, le bassiste, qui a fait son baptême du chant. Mais pour certains titres, on voyait bien qu’on aurait besoin d’une voix extérieure. C’est là que je me suis souvenu de Zakia. On lui a proposé de faire des essais et ça a été tout de suite concluant.

Son arrivée a-t-elle eu une influence sur la composition des morceaux?

Pas vraiment. Tous les titres du live était déjà composés quand Zakia est arrivée. Seul le morceau «Outsight» a été composé en commun avec elle. Mais son interprétation de ces morceaux donne forcément une couleur inédite à notre musique. Les chanteurs qu’on a eus jusqu’à présent, que ce soit Sir Jean, Jamika ou Jerry, avaient des voix beaucoup plus noires, plus groovy. Zakia a une couleur très soulful mais plus blanche. Assez pop ou trip hop finalement. Du coup, même quand nos instrumentaux restent assez fidèles aux fondamentaux de Zenzile, la voix les emmène complètement ailleurs. Un morceau comme «Escape», par exemple, qui est chanté à deux voix avec Zakia et Matthieu, est certainement une des chansons qui sort le plus de l’ordinaire dans toute notre carrière. On a mis un peu de temps à lui trouver la couleur adéquate, mais aujourd’hui je trouve qu’il est assez tubesque.

C’est drôle, car «Outsight» est presque le titre du disque que je trouve le plus Zenzile pur-jus?

En fin de créa, on s’est rendu compte qu’il nous manquait peut-être un morceau un peu plus punchy, et on l’a donc composé tous ensemble. Zakia a proposé des choses, rebondi sur certaines de nos idées. Si ça sonne Zenzile, ça prouve qu’elle a bien trouvé sa place dans le groupe.

Ça n’a d’ailleurs pas dû être si évident pour elle de trouver ses marques dans un groupe qui joue ensemble depuis presque sa naissance?

Sans doute, même si c’était probablement moins difficile pour elle que pour quelqu’un qui ne viendrait pas du tout ce monde-là. Ses deux parents sont dans la musique, elle connaît l’envers du décor, elle sait où elle met les pieds. Elle nous connaissait aussi très bien. Elle a fait une école de chant, donc on peut imaginer qu’elle avait envie que ça fasse partie de sa vie.

L’an prochain, on fêtera les 20 ans de votre premier EP, «Dub Promozione». Est-ce plus facile ou plus difficile de faire vivre un groupe quand on a 20 ans de carrière?

C’est clair que le public ou les professionnels préfèrent généralement la nouveauté. C’est fatalement moins excitant pour eux de programmer Zenzile aujourd’hui que lorsqu’on déboulait avec un son qu’ils n’avaient jamais entendu. Mais l’industrie du disque a tellement changé qu’aujourd’hui c’est devenu très difficile de vieillir en tant que groupe. En gros, un jeune groupe qui débarque aujourd’hui avec un son neuf va être confronté à ce même problème dans trois ou quatre ans. Le temps de sortir un bon album, de faire une belle tournée, et on en parlera déjà comme d’un artiste installé, moins excitant. Ça ne lui laisse pas beaucoup de temps pour se développer, pour évoluer. Nous, on a quand même la chance d’avoir encore pas mal de gens qui nous suivent et qui nous apprécient. On a perdu et gagné des gens à chaque nouveau disque, parce qu’on n’a jamais cherché à reproduire une même recette. Ça sera encore sans doute le cas avec celui-ci. C’est quelque chose qu’on a bien intégré. On a tous en tête des disques qu’on adore aujourd’hui alors qu’on ne les a pas compris quand on les a découverts. Du coup, on cherche d’abord à se faire plaisir en tant que musiciens, sans essayer de mettre trop en péril notre économie de groupe. Pour le moment, l’équilibre tient encore pas trop mal.

Lisez notre chronique de « Eléments »: https://www.lechabada.com/zenzile-elements-yotanka/

Zenzile sera en concert au Chabada le 6 octobre pour fêter ses 20 ans (en retard, mais quand même !) en compagnie de plein d’amis qui ont croisé la route du groupe tout au long de sa carrière. Infos & tickets : lechabada.com/events/zenzile-feat-zakia-vincent-segal-jamika/

Buzz Booster #9 : Appel à candidatures

BuzzBooster9

Au bout de neuf éditions, est-il encore besoin de présenter le tremplin national hip hop Buzz Booster? Si oui, foncez lire tout ce dont vous avez besoin sur le lien en bas de l’article. Pour les autres, sachez que vous devez candidater avant le 29 septembre 2017 pour faire au moins aussi bien que Rezinsky l’an dernier, qui avait gagné la finale régionale (mais qui s’était incliné à la finale nationale devant le Breton Di#se).

May the force be with you!

Toutes les infos pratiques sur le site de Pick Up Production.

Tournée de Bulle pour tout le monde

Les habitants de la ville de Mazé ont vraiment de la chance. Ils ont l’une des médiathèques les plus actives de la région (et l’un des meilleurs fonds de bandes dessinées). Cette saison, l’équipe de La Bulle vous donne tout un tas de rendez-vous culturels autour d’une thématique féminine. Pour démarrer les festivités, le vendredi 22 septembre, c’est notre programmateur Stéphane Martin (avec une perruque blonde?) qui ira présenter les temps forts de la nouvelle programmation du Chabada. Il sera accompagné pour l’occasion d’un représentant de l’Equipe Espoir Chabada 2017, Grise Cornac, qui donnera donc un petit concert gratuit en fin de soirée. Ceux qui ont déjà vu le duo sur scène savent qu’on n’oublie pas facilement la voix et la présence de la pétillante Aurélie. A consommer sans modération.

LO’JO : A fleur de mots

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En Amour, comme en musique, dans une relation longue, il faut savoir entretenir la passion. Surprendre son partenaire, le séduire à nouveau. Montrer une autre facette de sa personnalité tout en restant celui qu’on aime. Et offrir des fleurs. C’est ce que fait Lo’Jo, avec ce nouvel album « [Fonetiq Flowers] ». On y découvre un groupe presque nouveau, tout en retrouvant celui qu’on suit depuis plus de trente ans. Rencontre avec Denis Péan et Richard Bourreau, les deux piliers historiques de Lo’Jo. 

« [Fonetiq Flowers] » sonne assez différent des autres disques de Lo’Jo. J’ai l’impression que « Cinema El Mundo », votre album précédent, a clos un chapitre de votre histoire ?

Denis : On ne prend pas tellement de décisions. C’est toute une vie qui nous amène à ça. J’ai l’impression depuis toujours d’essayer de traquer l’indicible. C’est une mission absolument impossible. J’ai donc toujours le sentiment de ne pas y être arrivé. Donc recommençons. Allons plus loin. Soyons à la fois plus exigeants et à la fois plus ouverts. En 2009, avant « Cinema El Mundo », nous avions déjà sorti « Cosmophono », qui est un disque qui n’a pas trouvé son public. Tout y était joué live, sans vraiment de re-recording. C’était très brut. Nos invités venaient surtout du jazz, comme la jeune trompettiste Airelle Besson. Avec le recul, je pense qu’on avait livré un fruit qui n’était pas mûr. Parfois, il faut trois disques pour en faire un. C’est un chemin vers une façon de faire. C’est plus un parcours qu’un aboutissement. Et peut-être qu’il fallait qu’on passe par « Cosmophono » puis par « Cinema El Mundo » pour réussir « Fonetiq Flowers ».

Richard : Je crois aussi que la grosse différence c’est qu’on s’y est pris très longtemps à l’avance, ce qui nous a permis d’aller vraiment au bout du bout des choses, sans rien s’interdire. Sur certains morceaux par exemple, certaines parties ont été essayées avec divers instruments, et on choisissait à la fin celle qui collait le mieux à l’ensemble. Ca a été un vrai terrain d’expérimentation en amont, mais on voulait que les choses soient le plus arrêtées possible avant d’entrer en studio, même s’il y a toujours des trouvailles de dernière minute qui t’obligent à réinventer encore et toujours le morceau.

C’est probablement votre disque le moins « ethnique ». Et le plus electro-acoustique.

D : C’était un parti-pris. Je me suis beaucoup amusé avec Tonio, notre ingé-son, à créer des textures sonores, j’ai un capital de sons qui sont des rebuts de studio, que j’aime bien retravailler par la suite en changeant l’équalization, le tuning, les effets. J’ai fait des mélanges sonores qui ont servi de texture à pas mal de chansons de ce disque. Quand on nous a collé l’étiquette « world music » dans les années 90 à la sortie de « Fils De Zamal », je n’ai pas trop compris ce que ça voulait dire. On a toujours mis la matière sonore en avant dans Lo’Jo. Même les voix, les textes, sont au service de la musique.

R : C’est effectivement quelque chose que Denis essayait d’impulser depuis déjà quelques disques, mais tout le monde dans le groupe n’y était peut-être pas encore prêt. Cette fois-ci, le timing était le bon. C’est venu très naturellement. On a voulu trouver la même émotion, les mêmes couleurs, avec des vieux claviers, des samplers, qu’avec nos instruments traditionnels.

Vous avez travaillé pour la première fois avec Albin de la Simone sur ce disque ?

D : Je voulais travailler avec un pianiste, parce qu’il y a des choses que je ne savais pas faire. Jean Lamoot, notre producteur, nous a soumis le nom d’Albin de la Simone. On lui a fait confiance et ça a été une belle rencontre pendant deux jours en studio à Paris, peu avant que le groupe ne démarre l’enregistrement du disque en tant que tel. J’ai été très touché par l’attention qu’il portait aux chansons, à sa manière de les agrémenter, de les étoffer, les colorer.

Comment s’est déroulée la composition de ce disque ?

R: Denis est arrivé avec des trames de morceaux déjà très avancés. On les a donc terminés ici ou là, en fonction des opportunités de tournée pour enregistrer nos invités, ou bien des instruments qui nous tombaient sous la main à tel ou tel moment. Je me souviens par exemple que Baptiste, notre batteur, s’amusait beaucoup avec une sorte de petite guitare un peu bizarre qu’on avait trouvée dans la maison qu’on occupait alors à Austin. Au bout d’un moment, on s’est rendu compte que ça collerait bien dans « Fonetiq », le morceau d’ouverture de l’album. Comme nous avions toujours avec nous un petit studio mobile, ça nous a permis d’enregistrer des tas de bouts à droite à gauche pour composer les morceaux. Pour « Stranjer Than Stranjer », on est par exemple partis des voix des filles, et on a créé des accords en se basant sur leur ligne de chant, et le morceau s’est construit peu à peu comme ça, jusqu’à ce qu’on l’envoie à Erik Truffaz, qui l’a emmené encore ailleurs.

D: La base de « Fonetiq » avait été composée en une heure, alors que j’étais seul à la maison, un soir d’hiver un peu amer. J’avais épuisé toutes les ressources de gammes de piano que je connaissais. Je suis allé chercher un vieux clavier enfantin qui avait servi dans « Dans la poussière du temps » (dans « Mojo Radio ») et qui avait appartenu à Yamina (Nid El Mourid, une des chanteuses de Lo’Jo) quand elle était enfant. J’ai choisi le son disco, j’ai trouvé un tempo, une suite d’accords, et j’ai réuni des bouts de textes arbitrairement, pas mal de choses que j’avais écrites au Liban. C’est la première fois que je composais une chanson aussi vite.

C’est un disque très arrangé, avec plus d’électronique que d’habitude. Cela a-t-il compliqué le travail de réappropriation pour le jouer sur scène ?

R: Pas tant que ça au final. Denis a un nouveau système qui lui permet de déclencher en direct tout un tas de samples ou d’éléments qu’on a utilisés pour l’album. Et comme ce sont souvent des squelettes assez minimalistes, ça nous laisse beaucoup de place pour nous exprimer avec nos propres instruments par-dessus. Ca laisse même de la place à l’improvisation si on veut, il suffit juste que Denis relance plusieurs fois le squelette. Ca ne nous fige pas sur une structure bien définie, comme c’est parfois le risque avec les musiques électroniques. A part « Figurine » et « Nanji » qui sont deux titres un peu plus abstraits, on va donc pouvoir jouer l’intégralité du disque. Après, comme d’habitude, c’est surtout une histoire de choix. On ne peut jamais rejouer toutes les parties de tous les instruments qui sont sur un disque. Il faut garder ce qui est le plus emblématique. Mais les premiers retours que nous a fait notre entourage technique pendant les résidences était très encourageants. Ils nous ont tout de suite dit qu’ils retrouvaient bien l’univers sonore de l’album. C’est plutôt bon signe !

Lo’Jo présentera « [Fonetiq Flowers] » sur la scène du Chabada le samedi 16 Décembre 2017.

N’oubliez pas non plus d’aller visiter l’exposition « Atlas d’un éphémère », qui retrace « L’épopée de Lo’Jo, carnet d’un grand voyage dans la poussière du temps ». l’exposition se tiendra du 7 septembre au 5 novembre 2017 au Grand Théâtre d’Angers.

CHRONIQUE:

Lo’Jo – [Fonetiq Flowers] (Harmonia Lundi / World Village / PIAS)

Lojo_FonetiqFlowersLongtemps, les média parisiens ont pris Lo’Jo pour des campagnards, n’accordant que peu d’intérêt à la musique des Angevins, obligés de trouver une crédibilité à l’étranger. Les média n’avaient pourtant pas tout à fait tort. Comme la nature qui renaît intacte à chaque printemps, Lo’Jo continue de sortir, 28 ans après son premier essai, des disques pertinents. Cette fois-ci ce sont des « Fonetiq Flowers » qui ont éclos dans la campagne angevine, de graines apportées des quatre vents. Un disque ambitieux, surprenant. Mais qui touche au cœur, comme d’habitude. Vous y danserez sur une valse brinquebalante rythmée par un chœur d’enfants (« Chabalaï »), retrouverez vos amours de jeunesse avec « Fonetiq », retiendrez votre souffle sur le magistral « J’Allais », hurlerez à pleins poumons « I will give you a wish » avec les sœurs Nid El Mourid (« Tu Neiges »), explorerez les tréfonds de vos âmes en vous accrochant à la trompette d’Erik Truffaz (« Stranjer Than Stranjer »), puis éteindrez la lumière sur « Figurine », le bouleversant instrumental final. Jusqu’au prochain printemps.

Disponible en CD/LP/digital le 1er septembre 2017.

 

www.lojo.org

THE LOIRE VALLEY CALYPSOS – AMOUR, GLOIRE & NOIX DE COCO

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La réussite ne tient à pas grand chose. Après avoir découvert le calypso presque par hasard, Thibaut Kret a recruté de vieux complices pour monter The Loire Valley Calypsos et jouer dans les guinguettes. Aujourd’hui, il se retrouve invité à jouer chez Antoine De Caune sur Canal+ ou encore chez Radio Nova. Rencontre avec Thibaut aka Blind Bud, chanteur et banjoïste des Caraïbes ligériennes.

Comment tu as découvert le calypso ?

Il y a quelques années, j’avais un projet plutôt axé sur le blues très roots, qui s’appelait Bud McMuffin. J’effectuais alors beaucoup de recherches pour me documenter sur des vieux bluesmen d’avant-guerre, et notamment sur un chanteur appelé Blind Blake. J’ai réalisé en fouillant sur le Net qu’il existait un autre Blind Blake, aux Bahamas, qui jouait du calypso. Ca m’a tout de suite plu. Coup de bol, le label suisse Moi J’Connais Records a réédité un de ses albums au même moment. Je me suis donc acheté le LP, et le virus était inoculé. J’ai vite eu envie de m’y frotter moi-même. J’aimais bien le côté assez minimaliste : chant/banjo ou guitare + contrebasse + percussions. Au début, il n’y avait même pas vraiment de percussions, juste un shaker et un bongo. Du coup, j’ai aussi monté le groupe dans un but « alimentaire ». Il devait me permettre de jouer en local, en petite formule légère, dans des guinguettes, etc. pour pouvoir boucler mon intermittence, vu que mes autres projets de l’époque (Bud McMuffin, 2024) ne me permettaient pas de faire suffisamment de dates. Et de fil en aiguille, c’est devenu mon gagne-pain principal… (rires)

Ca a été facile de trouver des musiciens ?

Je ne suis pas allé chercher très loin. J’ai demandé à Antoine parce que je jouais déjà avec lui dans Bud McMuffin, que c’est mon cousin et que c’est un super batteur ! (rires) Pierre (contrebasse) et Antoine ont joué dans plusieurs groupes ensemble depuis super longtemps (ils sont en ce moment dans Cherry Plum). On a sensiblement les mêmes goûts musicaux, ils ont donc vite accroché au calypso, et Antoine a apporté plein d’idées de nouvelles percussions pour élargir le spectre sonore. Récemment, quand on a enregistré notre album avec Freddy Boisliveau (Des Lions Pour Des Lions), Freddy a proposé pas mal d’arrangements à la guitare qui nous ont beaucoup plu et qu’on voulait garder pour la suite. Du coup, on a recruté un quatrième larron à la guitare électrique, en la personne de Sam Galienne (Cherry Plum). Il s’est acheté une chemise à fleurs et son contrat était signé.

Le disque est composé pour moitié de standards et pour moitié de compositions originales. Ce qui est assez rare, vu que la plupart des disques de calypso de l’époque reposait sur un petit catalogue de standards que tout le monde revisitait…

On s’est effectivement d’abord fait la main sur des standards. Puis nos premières compos étaient vraiment décalquées sur des morceaux traditionnels pour garder cette patte authentique qui nous plaisait. Mais aujourd’hui, on se rend compte qu’on varie peu à peu les plaisirs. Plusieurs morceaux sur le disque ouvrent des pistes qu’on espère bien creuser à l’avenir. Pourquoi pas vers du mambo ou de la rumba ? Pourquoi pas du chant en français ?

La génération plus ancienne a découvert le calypso avec Harry Belafonte. Les plus jeunes avec Calypso Rose. Est-ce que tu peux nous donner des pistes pour aller creuser le sujet ?

Il y a donc ce disque de Blind Blake & The Victoria Royal Hotel Calypsos, mais aussi plusieurs excellentes compilations sur le label Frémeaux & Associés, qui fait un travail absolument dingue sur les musiques enregistrées d’avant-guerre. Ce sont de véritables mines d’or ! Il y a un volume par île : le mento jamaïcain, le gumbay des Bahamas, et le calypso de Trinidad. Avec ces trois compiles, tu as déjà une vue d’ensemble assez précise de ce qui pouvait se faire à l’époque. Et ensuite, il faut fouiller sur le Net, vu que de plus en plus de collectionneurs mettent leurs trouvailles en écoute sur YouTube, etc.

Vous avez d’ailleurs monté votre propre label MaAuLa Records pour vous aussi rééditer de vieilles pépites ?

Au départ, on a créé ce label pour sortir notre premier 45-tours. On est potes avec les mecs qui tiennent le label et magasin suisse Bongo Joe. Ils nous avaient invités à jouer chez eux, et on a parlé tout le week-end de label et de rééditions. Sur le chemin du retour, dans la voiture, on a tous décidé qu’on voulait nous aussi participer. On avait repéré plein de pépites qui n’avaient jamais été rééditées, on était en contact avec des collectionneurs à l’étranger… C’est comme ça qu’on a ressorti des compiles de The Wrigglers et de The Talbot Brothers. Mais on sort également les disques de groupes actuels, toujours dans une veine exotique décalée, comme Passion Coco. On vient aussi de sortir une compile digitale, « Exotic Viennoiseries », avec dix groupes français qui se réapproprient des musiques du monde avec lesquelles ils n’ont à priori aucun lien.

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Pourquoi le calypso et d’autres musiques « exotiques » (mambo, biguine, etc.) ont eu un tel succès dans les années 50/60 ?

C’étaient les débuts de l’aviation civile. Les gens les plus aisés ont commencé à faire des voyages, et les Caraïbes ne sont pas très loin des côtes américaines. A l’époque, il était difficile de se faire une idée d’une culture étrangère (et donc de promouvoir des destinations). Ca passait beaucoup par la musique ou le tout jeune cinéma, mais c’était souvent résumé à des clichés (rappelez-vous des chemises à fleurs d’Elvis Presley dans ses films). Du coup, beaucoup d’orchestres américains se sont mis à parodier les groupes des îles, qui ont souvent eux-mêmes reproduit les clichés qu’on attendait d’eux pour pouvoir jouer devant les touristes. C’est ce qui a fini par donner cette image easy-listening à toutes ces musiques exotiques… Mais plein de grandes stars de l’époque en ont tâté à un moment ou à un autre : Dizzy Gillespie, Harry Belafonte, Paul Anka, Robert Mitchum ou Henri Salavador en France.

Justement, vous avez été invités sur Canal+ et chez Radio Nova… Est-ce qu’ils ont invité un groupe un peu rigolo, ou bien vous ont-ils pris au sérieux comme n’importe quel autre groupe ?

Un peu des deux, j’ai envie de dire. On est bien conscients que les gens accrochent d’abord sur le côté très léger et fun des chansons, parce qu’on a tous un peu besoin de légèreté en ce moment avec ce qui se passe dans le monde… Mais j’ai pas l’impression qu’on nous prenne que pour des amuseurs non plus. La personne qui s’occupe de notre promo ne pensait pas trop que les média nationaux accrocheraient au projet par exemple, alors que finalement les retours sont plutôt super positifs. On a aussi le parti-pris de jouer très roots, contrairement à d’autres groupes de calypsos avec des claviers, un grand orchestre, etc. C’est notre particularité, et peut-être que finalement c’est ce qui touche les gens ?

Plus d’infos sur loirevalleycalypsos.com

CHRONIQUE:

The Loire Valley Calypsos – Chalonnes Island (MaAuLa Records)

LoireValleyCalypsos_chroMarre de ce pays de cons et de cette époque complètement folle? Ecoutez le premier album de The Loire Valley Calypsos. Vous vous retrouverez instantanément catapultés en croisière dans les Caraïbes à la fin des années 50s, à siroter un cocktail à base de noix de coco. Ah, tout de suite, on se sent mieux, non ? Le trio (devenu récemment quatuor) a enregistré une poignée de standards de calyspos jamaïcain, trinidadien et bahaméen rôdés sur scène depuis deux ans, mais aussi une bonne moitié de compositions originales qui sonnent toutes plus vraies que nature ! Et même si le groupe s’attaque à une musique extrêmement codifiée, les Angevins ont su trouver une signature sonore très personnelle, roots et finement arrangée à la fois, qui fait d’eux beaucoup plus qu’un simple groupe easy-listening. Dès que l’aiguille touche le vinyle, on ondule alors lascivement du bassin, on déboutonne un peu sa chemise à fleurs, on ferme les yeux, et on relance l’album une fois qu’il est (déjà?) fini.

 

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Tempo Rives 2017

Prog-Tempo-web

Ca y est, c’est vraiment l’été car le festival gratuit Tempo Rives a commencé! Comme tous les ans, les premières parties sont assurées par la crème des jeunes groupes angevins qu’il faut absolument aller applaudir. Ne loupez pas non plus la dernière date de cette édition 2017 avec le grand retour de Lo’Jo à la maison (qui viendra d’ailleurs présenter son nouvel album en exclusivité au Chabada en décembre).

La programmation de Tempo Rives est toujours très riche en découvertes, mais nous ne saurions trop vous encourager cette année à venir vous prendre une petite claque avec le concert des Sud-africains de BCUC (mardi 1er Août) dont la réputation scénique est en train de mettre absolument tout le monde d’accord!