Zenzile est de retour. Avec une nouvelle chanteuse qui ne marchait sans doute pas encore lorsque le groupe s’ est créé il y a 22 ans. Depuis, les Angevins mènent leur carrière comme ils l’entendent, sans se soucier de ce qu’on attend d’eux et avec le besoin perpétuel d’évoluer pour ne jamais s’ennuyer. Et c’est sans doute pour ça qu’ils nous sont devenus si indispensables. Rencontre avec Vincent Erdeven (claviers, guitares) pour connaître les contours de ce nouvel « Eléments ».
Avez-vous décidé que ce nouvel album aurait une déclinaison multi-media sur scène avant ou après sa composition?
Avant même de commencer la composition de ce disque, on savait qu’on voulait associer l’image et une certaine réflexion sur les lumières à nos concerts. On a déjà l’expérience de deux ciné-concerts, donc on commence à bien maîtriser l’apport des images pour construire un univers, mais on ne voulait pas se laisser enfermer dans une narration. On sait que notre musique est assez «cinématique», on voulait donc créer une sorte d’atmosphère avec les vidéos et le travail de notre éclairagiste qui irait dans le même sens. Mais cette décision n’a pas influencé notre mode de composition. On a gardé les mêmes méthodes de travail que par le passé, même si on a bricolé avec la vidéo assez tôt dans le processus. On s’est finalement retrouvés avec une quinzaine de titres exploitables pour le live, qu’on a testés sur scène pour la première fois au Quai l’été dernier en sortie de résidence. Et on en a sélectionné neuf, qu’on a un peu réarrangés, pour le disque «Éléments». On a également retravaillé l’ordre des morceaux pour le disque -et finalement pour la scène aussi- pour que ça raconte une histoire, qu’il y ait une meilleure harmonie entre les ambiances du disque.
Du coup, est-ce que ça veut dire que pour la tournée qui va venir, vous ne jouerez que ces nouveaux morceaux?
On jouera tout l’album + deux inédits qu’on a travaillés avec Zakia, c’est sûr. Mais on va aussi intégrer d’anciens instrumentaux tirés de précédents disques, parce qu’on nous les demandera. On est justement en train de réfléchir là-dessus en ce moment. Pour savoir si on les intègre au cours de la setlist, ou bien si on les met en bloc à la fin. Julien Brevet, qui bosse sur les vidéos pour «Éléments», et Stéphanie, notre éclairagiste, ont déjà des idées pour intégrer des images sur les vieux morceaux, donc il y a a priori moyen de rendre le tout assez cohérent.
Une nouvelle chanteuse, Zakia, intègre le groupe pour ce disque. Comment l’avez-vous connue?
On la connaît depuis toujours en fait. On est très amis avec ses parents, qui ont tous les deux joué avec Zenzile à un moment ou à un autre. Un soir, son père m’a fait écouter le groupe de musique electro de Zakia et j’avais trouvé qu’elle avait une super voix. Au départ de ce disque, on pensait être parti pour faire un disque instrumental. Au fur et à mesure de la composition, certains morceaux appelaient quand même des voix. Pour certains, je m’y suis collé, pour un autre, c’est Matthieu, le bassiste, qui a fait son baptême du chant. Mais pour certains titres, on voyait bien qu’on aurait besoin d’une voix extérieure. C’est là que je me suis souvenu de Zakia. On lui a proposé de faire des essais et ça a été tout de suite concluant.
Son arrivée a-t-elle eu une influence sur la composition des morceaux?
Pas vraiment. Tous les titres du live était déjà composés quand Zakia est arrivée. Seul le morceau «Outsight» a été composé en commun avec elle. Mais son interprétation de ces morceaux donne forcément une couleur inédite à notre musique. Les chanteurs qu’on a eus jusqu’à présent, que ce soit Sir Jean, Jamika ou Jerry, avaient des voix beaucoup plus noires, plus groovy. Zakia a une couleur très soulful mais plus blanche. Assez pop ou trip hop finalement. Du coup, même quand nos instrumentaux restent assez fidèles aux fondamentaux de Zenzile, la voix les emmène complètement ailleurs. Un morceau comme «Escape», par exemple, qui est chanté à deux voix avec Zakia et Matthieu, est certainement une des chansons qui sort le plus de l’ordinaire dans toute notre carrière. On a mis un peu de temps à lui trouver la couleur adéquate, mais aujourd’hui je trouve qu’il est assez tubesque.
C’est drôle, car «Outsight» est presque le titre du disque que je trouve le plus Zenzile pur-jus?
En fin de créa, on s’est rendu compte qu’il nous manquait peut-être un morceau un peu plus punchy, et on l’a donc composé tous ensemble. Zakia a proposé des choses, rebondi sur certaines de nos idées. Si ça sonne Zenzile, ça prouve qu’elle a bien trouvé sa place dans le groupe.
Ça n’a d’ailleurs pas dû être si évident pour elle de trouver ses marques dans un groupe qui joue ensemble depuis presque sa naissance?
Sans doute, même si c’était probablement moins difficile pour elle que pour quelqu’un qui ne viendrait pas du tout ce monde-là. Ses deux parents sont dans la musique, elle connaît l’envers du décor, elle sait où elle met les pieds. Elle nous connaissait aussi très bien. Elle a fait une école de chant, donc on peut imaginer qu’elle avait envie que ça fasse partie de sa vie.
L’an prochain, on fêtera les 20 ans de votre premier EP, «Dub Promozione». Est-ce plus facile ou plus difficile de faire vivre un groupe quand on a 20 ans de carrière?
C’est clair que le public ou les professionnels préfèrent généralement la nouveauté. C’est fatalement moins excitant pour eux de programmer Zenzile aujourd’hui que lorsqu’on déboulait avec un son qu’ils n’avaient jamais entendu. Mais l’industrie du disque a tellement changé qu’aujourd’hui c’est devenu très difficile de vieillir en tant que groupe. En gros, un jeune groupe qui débarque aujourd’hui avec un son neuf va être confronté à ce même problème dans trois ou quatre ans. Le temps de sortir un bon album, de faire une belle tournée, et on en parlera déjà comme d’un artiste installé, moins excitant. Ça ne lui laisse pas beaucoup de temps pour se développer, pour évoluer. Nous, on a quand même la chance d’avoir encore pas mal de gens qui nous suivent et qui nous apprécient. On a perdu et gagné des gens à chaque nouveau disque, parce qu’on n’a jamais cherché à reproduire une même recette. Ça sera encore sans doute le cas avec celui-ci. C’est quelque chose qu’on a bien intégré. On a tous en tête des disques qu’on adore aujourd’hui alors qu’on ne les a pas compris quand on les a découverts. Du coup, on cherche d’abord à se faire plaisir en tant que musiciens, sans essayer de mettre trop en péril notre économie de groupe. Pour le moment, l’équilibre tient encore pas trop mal.
Lisez notre chronique de « Eléments »: https://www.lechabada.com/zenzile-elements-yotanka/
Zenzile sera en concert au Chabada le 6 octobre pour fêter ses 20 ans (en retard, mais quand même !) en compagnie de plein d’amis qui ont croisé la route du groupe tout au long de sa carrière. Infos & tickets : lechabada.com/events/zenzile-feat-zakia-vincent-segal-jamika/