VedeTT : Aimer Les Gens

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Crédit: Paul Liaigre

Il avait sorti son premier album seul, un peu comme une bouteille à la mer, il y a un peu plus d ’un an, quand les membres de son groupe avaient décidé de quitter le navire. Un an plus tard, il s’est malgré tout passé par mal de choses pour VedeTT. L’occasion était donc rêvée de faire le bilan de 2016 avec Florent Vincenlot alias Nerlov, l’âme mélancolique de VedeTT.

Ton album s’appelait «Tuer Les Gens», et il est sorti juste avant les attentats de Novembre 2015. Ça n’a pas dû être facile à défendre?

Cet album, je le travaillais dans mon coin depuis plusieurs mois déjà. Il s’appelait donc déjà comme ça -même si j’étais le seul à le savoir- avant les attentats de Charlie Hebdo en Janvier 2015. Je m’étais donc déjà posé la question. Mais finalement, j’avais gardé ce titre, parce que la chanson veut bien entendu dire le contraire. Ça parle de la difficulté de vivre avec les autres, des efforts qu’il faut faire pour y arriver, donc dans l’absolu c’est plutôt une chanson altruiste, ou en tout cas bienveillante. L’album est donc sorti en Octobre, et j’ai tout de suite suspendu la promo pour quelques semaines quand il y a eu les attentats. Plusieurs blogs et radios ont préféré annuler ce qui était prévu autour de la sortie du disque. C’était un peu bizarre. Mais finalement, au fil des semaines et des mois, je trouve que j’ai quand même réussi à le faire vivre plutôt bien, ce disque. Mon nom ne disait rien à personne, je n’avais quasiment aucun moyen. J’ai quand même réussi à trouver quelques belles dates, à avoir une bonne presse.

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Tu as ensuite reformé un groupe avec de nouveaux musiciens?

En Juin 2014, quand les musiciens de l’ancienne formation de VedeTT ont préféré arrêter, j’ai décidé de poursuivre seul l’aventure. Je pense qu’autour de moi plein de gens ont pensé que j’enregistrerais des morceaux pour moi, mais que le groupe était terminé. À la sortie de l’album, j’ai eu des propositions de concerts. J’ai donc demandé à Simon, le batteur de l’ancienne formation, si ça le brancherait de poursuivre avec moi. Et ensuite, j’ai demandé à Stw, le guitariste avec qui je joue déjà dans Sheraf. Ça s’est fait très naturellement en fait. Et plus on passe du temps ensemble, plus je suis heureux de vivre ça avec eux. C’est pas évident d’être les uns sur les autres 24h/24 quand tu pars en tournée, quand tu répètes tous les jours, etc. On a notamment fait quelques dates en Suisse en février dernier où on a pris un super pied. Bon, le fait de pouvoir faire du ski à côté, ça aide, c’est sûr! (rires)

Au printemps, tu as fait une reprise surprenante: «Et tu danses avec lui» de C. Jérôme?

Oui, j’adore les reprises. J’avais envie de m’essayer à un truc assez loin de mon univers habituel, pour voir ce que je serais capable d’en faire. J’ai réfléchi à reprendre du Deftones, du Booba, du Dutronc… Et je me suis un peu égaré sur YouTube pour atterrir sur ce morceau de C. Jérome. J’ai trouvé que c’était un vrai challenge. Parce que la mélodie est super en vrai. C’est juste que les choix de production de l’époque ont super mal vieilli, mais la chanson est mortelle. Je me suis donc dit que je voulais la faire le plus sérieusement possible, lui redonner son intensité. On a donc clippé en jouant live la chanson au Studio Tostaky. C’était cool!

En Juin, tu as joué au Chabada, pour la soirée de l’Equipe Espoir. J’ai l’impression qu’il s’est passé un vrai truc à ce concert?

C’est sans doute le meilleur concert que j’ai jamais fait. C’était un concert très émouvant pour moi. De jouer à la maison, devant les potes, au Chab’, qui est une salle que j’aime beaucoup, j’y ai joué plusieurs fois, je m’y sens bien. Le Club était super rempli, je ne m’y attendais pas. Ça m’a fait vraiment plaisir. C’était aussi peu de temps après le décès très brutal de Laurent, qui travaillait justement à la compta du Chabada. Je ne le connaissais pas tant que ça, mais je l’aimais bien, et son décès m’avait beaucoup marqué, parce que ça confortait un peu mes idées sur la fragilité de la vie, tout ça… Bref, tout ça réuni a fait que j’ai vécu un moment très spécial ce soir-là. Et ça s’est a priori ressenti sur la musique. On a fait d’autres super concerts depuis celui-ci, mais il garde effectivement une place à part pour moi.

Cet été tu as aussi joué à Tempo Rives, et tu as décidé à cette occasion de renommer la chanson «Tuer Les Gens» en «Aimer Les Gens».

Oui, l’idée m’est venue dans l’après-midi. Comme c’est un festival plutôt familial, je me suis dit que c’était pas incohérent. Et puis surtout, ça veut dire la même chose si tu écoutes les paroles de la chanson, comme je l’expliquais tout à l’heure. C’était un concert un peu bizarre. On n’est pas habitués à jouer en plein air, de jour. En plus, la météo était très mitigée ce soir-là. ce n’était pas notre public de prédilection. Mais finalement, au fur et à mesure des chansons, ça l’a fait, je crois qu’on a réussi à embarquer les gens avec nous.

Il y a quelques semaines, tu es parti jouer à Austin dans le cadre des échanges avec Angers. Tes impressions?

C’est difficile d’avoir un avis objectif. On est resté une semaine. On est partis en Novembre. Chez nous, il faisait un temps de merde. Là-bas, il faisait super bon, on était en T-shirts. On a côtoyé que des gens super cool qui bossaient dans la musique, ou la culture. On a joué dans de super clubs. Bref, ça ressemblait méchamment au Paradis pour nous. Mais je me doute bien que lorsque tu vis là-bas tous les jours, tu te fais rattraper par la vraie vie. La preuve, on est arrivés le lendemain de l’élection de Trump qui a fait un gros score à Austin, alors que tous les gens qu’on côtoyait étaient eux complètement dégoutés. C’est donc fatalement plus nuancé que ce qu’on a vécu. Même si je pense que c’est une ville où il fait plutôt bon vivre. Sinon, on a joué trois concerts là-bas. Les gens étaient un peu surpris d’entendre un groupe avec une musique aussi mélancolique. C’est pas trop dans la culture locale où il faut quand même pas mal d’entertainment. Mais les retours ont été plutôt bons, je pense que ça les a touchés. On a aussi joué un live pour la super radio KUTX. Ça, c’était vraiment une chouette expérience! On n’arrive pas trop à avoir accès aux radios françaises, mais on aura au moins joué pour une super radio américaine et pour la radio nationale suisse, cette année! (rires)

Tu viens de sortir deux nouveaux morceaux, en français. Il n’y avait qu’un seul titre en français dans l’album, que tu avais même hésité à mettre. Tu as eu un déclic?

Oui, c’est vrai que j’apprécie de plus en plus de chanter en français. Au début, je me sentais vraiment ridicule, parce que ce n’est pas du tout mon background. Je n’écoute quasiment aucun groupe qui chante en français. Mais je me rends compte que ça me permet d’aborder des choses plus profondes.Je vais bientôt me mettre à la composition du deuxième album, il y aura forcément pas mal de titres en français.

Pour mémoire, revoici notre chronique de « Tuer Les Gens » à sa sortie:

VEDETT – Tuer Les Gens (Echo Orange)

vedett-tur-les-gensOn a tendance à l’oublier mais, derrière les synthétiseurs et les coupes de cheveux improbables, la new wave a parfois su prendre le visage d’une sorte de soul music blanche, dépouillée de sa chaleur mais certainement pas de son potentiel émotionnel (réécoutez les premiers disques de Soft Cell ou Bronski Beat au début des 80s…). Ça résumerait plutôt bien ce premier album de VedeTT, désormais devenu le projet solo de Florent «Nerlov» Vincelot (par ailleurs batteur de Sheraf et San Carol). Une immense mélancolie traverse en effet les onze titres de ce très beau disque, même lorsque les tempos s’emballent pour jouer les gros bras ou les insouciants («Fried», «Free Chicken», «I Don’t Care»). Sa voix rassurante plane alors sur ces nappes brumeuses et synthétiques soutenues par des arpèges de guitare, offrant des mélodies imparables que ne renierait pas Motorama. «Fade Away», «Little Plane», «Friday Morning», «Tourist» : les tubes en puissance ne manquent pas. Mais le sommet du disque reste le magnifique morceau-titre (le seul chanté en français) qui inventerait presque un Joy Division synth-wave mené par un jeune Etienne Daho au chant. Ce disque, malgré son titre un peu guerrier, donne envie de se faire des gros câlins. Et c’est probablement ce qui peut nous arriver de mieux en cette période complètement folle.

Plus d’infos: http://www.echo-orange.fr/artistes/vedett/