Qu’est-ce qu’il leur prend à tous (bizarrement pas besoin d’écriture inclusive ici), depuis quelques mois/années, de vouloir absolument convoiter, conquérir, annexer, envahir, occuper des territoires voisins ? Par quelle logique malade cherche-t-on à s’accaparer par la force des terres pour les purger ensuite encore plus de leurs ressources naturelles ? Est-ce que l’urgence ne serait pas plutôt de nous organiser collectivement pour que cette planète ne soit pas forcée de nous rejeter définitivement comme un vulgaire greffon ? Où va encore nous mener cet énième cancer des colons qui -toujours sous couvert d’idéologie nauséabonde- gangrène à nouveau nos sociétés ? Beaucoup de questions auxquelles il est de plus en plus difficile d’imaginer des réponses constructives. Alors, oui, j’avoue, c’est pas la grande grande pèche, ces temps-ci. Heureusement qu’il reste la musique. Et nos artistes angevin·es ont dû sentir que j’en avais besoin parce qu’ils et elles n’ont pas lésiné ni sur la quantité ni sur la qualité ni sur la variété ces dernières semaines !
Quelque chose me dit que Nerlov et Chahu sont un peu dans le même état que moi en ce moment. Du coup, le premier a invité le second pour une nouvelle collaboration. Mais malgré ce que laisse penser son refrain traînant, les deux hommes n’ont pas baissé les bras et ont fait ce qu’ils font de mieux : un putain de bonne chanson. Joyeuse et déprimée à la fois. C’est un peu leur spécialité, faut dire… « Cramé » est donc encore un pur hymne qui va faire danser et chanter en chœur dans les concerts, les bras levés, mais que vous allez aussi pouvoir écouter en boucle tout·e seul·e chez vous, le nez collé à la fenêtre striée de pluie…
Mais pas tout de suite, hein, parce qu’en ce moment il fait plutôt beau, et c’est pas comme si on attendait ça depuis des mois ! D’ailleurs, le soleil, c’est ce que chante Dorrr dans son tout nouveau single. Une fois l’aventure de The Blind Suns (tiens, encore !) terminée, la chanteuse avait sorti il y a quatre ans un premier disque solo très pop, comme pour tourner plus vite la page. Dorrr est désormais de retour, épaulée par le producteur Moon Pilot, avec un propos plus proche de ses bases musicales, plus indie, sensuel et un brin tourmenté. Et ça lui va bien. Vivement la suite !
Elle aussi n’avait donné que très sporadiquement de ses nouvelles depuis la fin de KissDoomFate, mais revoilà Mathilda qui s’associe au chanteur/guitariste Jamie Galienne pour former Split Cake. Leur premier single accueille également Kham Meslien à la contrebasse et Beranger Vantomme aux percussions. Autant vous dire que ça sonne ! « Dead End Bound » est une pop song efficace, au fort potentiel cinématographique, qui met donc le duo sur orbite de la plus belle des manières.
Orbite. La transition est toute trouvée pour parler du deuxième album de Bermud, « Oceans on the Moon », dont la sortie s’accompagne d’un troisième single, « Fallen Moon ». On le répète à chaque fois, mais Bermud avance à grands pas. Ce nouveau disque a définitivement digéré les influences du groupe et trouve sa propre voie entre pop, shoegaze et rock psychédélique. Vous croirez reconnaître ici ou là au détour des morceaux une envolée à la Black Angels, une guitare maladive à la Sonic Youth, ou une voix paresseuse à la Oasis, mais sans jamais tomber dans la copie scolaire. Mention spéciale à l’énorme « Call Out » que tous les fans du festival Levitation devraient s’empresser d’ajouter à leur playlist.
Les gars d’Alright Mela, eux, ont plutôt marché sur la dune. Le trio vient de sortir un nouveau single (qui annonce un nouvel album ?), toujours entre bass music et tradition orientale, et surtout toujours aussi efficace pour vous faire chalouper du bassin. On a rarement fait mieux que quelques notes de oud ou de derbouka sur une grosse basse electro pour mettre en transe les plus récalcitrant·es. À écouter à fort volume, quand les enfants et les chameaux sont couchés.
On reste en terres méditerranéennes avec Ennio qui vient de sortir un nouvel EP « Milano Bagdad », annoncé par deux singles dont on vous avait déjà parlé il y a quelques semaines. Le rappeur d’origine italienne y invite ainsi son collègue Salah Deen d’origine irakienne (que vous avez peut-être découvert lors d’un récent On Stage) à croiser la rime sur le titre éponyme de l’EP. Comme d’habitude chez Ennio, l’ambiance générale est sombre et oppressante. Mais si vous aimez les films de mafia où la nuit semble toujours infinie, c’est la BO qu’il vous faut !
En revanche, si vous préférez la lumière, le soleil et les good vibes, on vous conseille plutôt d’essayer le nouveau single des Riddimists. « Stalker » annonce la sortie d’un album enregistré au célèbrissime studio Black Box (qui n’a pas dû voir passer beaucoup de groupes de reggae dans ses murs). Vous avez peut-être déjà remué des fesses sur leur excellent reggae roots lors des soirées « Sors Tes Covers », on est très content de constater que leurs compositions originales sont aussi efficaces que leurs reprises. Ce n’est plus si fréquent d’entendre du reggae joué à l’ancienne avec un full band, merci donc de leur réserver le meilleur des accueils ! Riddim is love !
Qui sait, on verra peut-être The Riddimists en première partie d’un concert de Zentone ? Le super-groupe de dub composé des membres de Zenzile et des Lyonnais de High Tone ont remis le couvert pour un album (et donc probablement une tournée) dont le premier single vient de paraître. Porté par la voix en apesanteur du chanteur Jolly Joseph (les fans du divin Bim Sherman risquent de sursauter), ce « Messenger » transporte vers la voute céleste en un roulement de batterie noyé d’échos. Tous les va-t’en guerre de la Terre devraient écouter plus de dub, ça nous ferait des vacances…
… et nous éviterait ainsi de nous faire perdre du temps. Comme le chanterait presque Grise Cornac dans son nouveau single, justement co-composé par Vincent Erdeven (du Erdeven Spiritual Ensemble et de Zenzile). Pas sûr que ce morceau soit le meilleur pour clore cet article étant donné la façon dont on l’a commencé. Sauf si vous aimez les chansons tristes, belles et touchantes. Parce que là, no problem, vous serez magnifiquement servi·es. Avec un clip en parfaite adéquation pour souligner la solitude au milieu de la multitude. Mais ne nous reste-t-il pas finalement que ce seul espoir, que l’Émotion sauve le monde ?
Rédaction : Kalcha
