THE BLIND SUNS : AMERICAN IDOLS

© Antoine Villiers

Le cap du deuxième album est souvent délicat à négocier. Surtout quand le premier a créé un petit émoi au-delà des espérances. The Blind Suns n’a pas tremblé et s’est appuyé sur son expérience en Do-It-Yourself et ses nombreux concerts pour forcer le destin. Résultat, le trio angevin a su se constituer une équipe solide autour de lui (label, tourneur, producteur, etc.) et revient avec un album sous le bras taillé pour lui ouvrir les portes du succès. Rencontre avec Romain et Dorota avant la release party au Chabada le mercredi 18 avril…

L’état d’esprit pour la composition de ce deuxième album devait forcément être très différent de l’ambiance du premier ?

Dorota : Oui, pour le premier album, on n’a jamais pris conscience qu’on était en train de composer notre premier album. On composait tous les deux avec Romain des chansons qui nous plaisaient, c’est tout. Sans pression. Sans agenda. Et un beau jour, on s’est retrouvés avec plein de chansons qu’on aimait, et on s’est dit « Pourquoi ne pas en faire un album ?» Ensuite, on a recruté Jérémy à la batterie et on a commencé les concerts. Il n’y a donc pas eu de réflexion spécifique en amont. Ce sont les chansons qui ont été le point de départ de l’aventure. Là, c’est un deuxième album. Ca fait plaisir déjà parce que ça veut dire que l’aventure se poursuit dans le temps. Mais oui, il a demandé plus de réflexion, plus de travail sur la réalisation des morceaux. On avait aussi l’expérience des concerts qui influence forcément notre façon de composer. Ce nouvel album est probablement plus psyché-shoegaze et moins surf insouciant que le premier. Parce que c’est le son qu’on a sur scène…

Il reste tout de même plusieurs tubes à fort potentiel mélodique…

D: Oui, la mélodie, c’est toujours notre base de travail. C’est ce qu’on sait faire de mieux depuis le début. Le son, la production, ça doit venir après. On compose nos chansons à la guitare acoustique-voix. Si la chanson est bonne dans ce plus simple appareil, elle sera bonne avec tout type de traitements derrière, que ça soit du shoegaze, du surf, etc. Ca a été le cas pour « Ride », notre premier single de ce nouvel album. Il a été composé à la guitare acoustique + voix, alors qu’on avait tout de suite l’idée d’en faire quelque chose d’ultra-efficace, de très radio-friendly. C’est d’ailleurs le morceau qu’on a commencé en premier et qu’on a terminé en dernier, tellement on a essayé des arrangements dessus. On doit en avoir cinq versions différentes sur les disques durs… (rires) Mais c’est donc bien toujours la mélodie qui prime. Ca nous a permis de jouer nos morceaux dans des tas de conditions, des plus roots aux plus confortables.

Vous avez travaillé avec Charles Rowell, du groupe californien Crocodiles. Quel a été son rôle ?

D: On l’a rencontré au festival South by Southwest (SXSW) à Austin, l’album était déjà plus ou moins maquetté. Humainement, Romain et lui ont tout de suite accroché. C’était même drôle, ils se ressemblent beaucoup, humainement, musicalement et même vestimentairement ! (rires) On l’a invité à venir nous voir en concert, et finalement on espérait presque qu’il ne vienne pas, parce que les conditions du lieu n’étaient pas top, et on aurait préféré pouvoir lui présenter notre projet dans des conditions optimales. Mais finalement il est venu, et il a adoré le concert ! Il nous a proposé de travailler avec nous pour le nouvel album. On n’a pas voulu trop s’emballer, on s’est dit que c’était des paroles en l’air de fin de soirée… Et finalement il nous a relancés. Il se trouve qu’il habite à Lyon depuis un ou deux ans parce que sa chérie est française. Du coup, ça a pas mal simplifié l’organisation. Mais il était super motivé. Il est arrivé avec plein d’idées d’arrangements pour les morceaux qu’on lui avait envoyés. On a finalisé le disque avec lui pendant une dizaine de jours en studio.

C’est plutôt drôle, parce que je sais que le concert de Crocodiles au Chabada il y a quelques années a été un moment déterminant dans ton parcours musical, Romain ?

Romain : Oui, je lui en avais parlé quand on s’est rencontrés la première fois. Mais il a vite changé de sujet. Il était surtout intéressé par notre projet. A ma grande surprise, il avait déjà entendu parler du groupe qu’il avait dû voir passer sur le Net. Je l’avais ajouté en tant qu’ami sur Facebook, et même si on ne s’était jamais parlé, il avait repéré mon profil parce que lorsqu’on s’est rencontrés en vrai, il m’a vite remis. Et c’est vrai qu’on a tout de suite sympathisé, et qu’on est dans une même dynamique en terme de musique. C’est génial de pouvoir vivre ça avec quelqu’un dont tu respectes beaucoup la démarche et le travail. J’espère que ce n’est que le début d’une longue collaboration.

Je crois que Jérémy a abandonné la batterie électronique pour une batterie classique sur scène désormais ?

R: Au départ, le choix de la batterie électronique avait été un choix de raison, très pratique, parce que ça nous permettait de jouer dans des configurations ultra-légères, des petits lieux, etc. Mais ça bride quand même pas mal son jeu de batterie. Et aujourd’hui on a de plus en plus l’opportunité de jouer sur de plus grosses scènes, des festivals, et clairement, en terme de puissance sonore et d’énergie, une vraie batterie s’est vite imposée.

Vous êtes retournés jouer aux Etats-Unis pour la cinquième fois. Ils vous adorent !

R: Oui, on avait sept dates là-bas du 9 au 17 Mars. On y va tous les ans en fait. Au départ, jouer aux Etats-unis, c’était juste un rêve de gosse. Et plus on avance, et plus on se dit qu’on a peut-être une carte à jouer là-bas. Cette tournée a été bookée un peu au dernier moment. Finalement, on a juste eu à envoyer quelques mails et tout s’est calé très vite. On est tous surpris des retours. Le fait d’y être allés plusieurs fois commencent à porter ses fruits. Notre nom a circulé parmi les pros à Austin, on commence à être mieux identifiés. On a la chance de jouer une musique qui leur est super familière, mais sans doute avec un je-ne-sais-quoi d’exotique pour eux, parce que je connais des potes américains qui jouent une musique assez similaire à la nôtre, et qui galèrent un peu plus à trouver des dates chez eux. C’est la prime à l’exotisme ! (rires)

Vous avez appris des choses à force de jouer là-bas ?

D: Je crois qu’on a surtout appris à s’adapter. En France, on a la chance de jouer dans de super conditions techniques. Et du coup, on a tendance à devenir un peu exigeants. Dès qu’il y a le moindre souci de son, tout le monde se prend la tête pour le résoudre, etc. Là-bas, si un ampli te lâche, et bien tu fais sans. Tu te démerdes. Le public s’en fout un peu. Ca ne l’empêchera pas de t’écouter et d’apprécier tes chansons. Désormais, on est vachement plus cool au moment de monter sur scène. On ne se prend pas la tête. On y va, et on joue nos chansons. C’est le principal !
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