TU DANSES ?

21.02.2024

Samedi dernier, j’étais au concert de French 79, dans la grande salle pleine à craquer du Chabada. Et, à un moment, j’ai senti une sorte de lâcher prise collectif, une ferveur contagieuse, qui s’est emparé de la foule alors que les infrabasses prenaient le contrôle des corps. Il y avait des jeunes, des vi…, pardon, des moins jeunes, des femmes, des hommes, peut-être des gens qui ne se sentent ni l’un ni l’autre ou les deux, des habitué·es du Chabada, des dont c’était probablement le premier concert dans le lieu, et tout le monde dansait dans un même élan. C’était beau et émouvant. Je me suis alors dit qu’il n’y avait pas tant de choses sur Terre qui permettaient de rassembler autant de personnes différentes et de les unir à ce point -à un instant T- dans une seule et même vibration. C’est la magie de la musique et de la danse, et ce n’est pas un hasard si tous les régimes autoritaires du monde s’empressent de les interdire dès qu’ils accèdent au pouvoir. Petit tour d’horizon des raisons de vibrer ensemble ces prochains jours…

Et s’il y a bien un rendez-vous où on peut faire chaque année l’expérience de cette transe collective, c’est le festival Levitation. Les premiers noms de la prochaine édition viennent d’être annoncés, et ça promet encore quelques beaux pas de danse dans le cosmos. Pour celles et ceux qui ne seraient encore jamais venu·es, un documentaire vient de sortir qui fait revivre les dix premières années de l’aventure. Ça devrait suffire à illustrer ce sentiment d’abandon et d’extase qui envahit une foule quand l’énergie du groupe sur scène lui tombe soudainement dessus.

© Rémi Sourice

Le groupe Fragile peut légitimement espérer faire partie de la programmation du Levitation cette année. Si certain·es en doutaient encore, le groupe vient de sortir une intense live-session, joliment filmée chez les copains·ines du Garage en décembre dernier. Leur emo-punk prend aux tripes et ça se sent/voit même par écran interposé.

Pour avoir eu la chance d’écouter en avant-première le premier album à venir de Nerlov, dont est extrait cet entêtant « Pas si grave » ci-dessous (mais aussi les précédents singles « À l’envers » et « Quel dommage », qui a récemment gagné le prix du public du Clip d’Ici 2023), je peux vous dire qu’on y entendra plus d’une bonne raison de se trémousser ensemble sur un dancefloor. Mais Nerlov ne serait pas non plus Nerlov sans ces punchlines sorties de nulle part qui permettent de danser moins bêtes : « J’préfère quelqu’un qui doute, qui manque de confiance en soi. Ça fait des gens moins cons, souvent moins sérieux, et ça c’est priceless, pardon c’est précieux. »

À l’époque de VedeTT, son précédent groupe, Nerlov avait sorti un album intitulé « Tuer les gens » juste avant les attentats du Bataclan, et un premier EP sous son nouveau blase intitulé « Je vous aime tous » juste avant le confinement, quand aucune interaction entre humain·es n’était possible. Alors autant vous dire que le moustachu est mieux placé que quiconque pour apprécier le sens du timing de Scenius : le duo franco-anglais vient en effet de sortir une reprise du mythique groupe allemand Can, pile la semaine de la disparition de son chanteur le plus emblématique, Damo Suzuki (qui était à l’affiche du premier Levitation). Sauf que c’est un morceau de 1976, que n’a donc jamais chanté Damo Suzuki qui avait déjà quitté le groupe à cette époque. Être dans la hype, ou juste à côté : quel meilleur hommage pouvait-on rêver pour Can ? La reprise synth-pop de Scenius est en tout cas super efficace, taillée pour faire danser les fans de Depeche Mode ou Ultravox du monde entier, et c’est bien le principal. We want more !

Des disques de Depeche Mode et d’Ultravox, il doit y en avoir aussi quelques-uns chez Franck Bergère, aka Frank and the machines. Il faut dire que le bonhomme connaît la musique : depuis plus de trente ans, on le croise dans des groupes de rock, de pop ou d’electro jusqu’à ce récent projet en solo qui le voit égrener de ci de là des singles souvent très cinématographiques. Pour le dernier en date, on est plutôt sur la grande scène du festival Glastonbury en Angleterre, tellement on imaginerait facilement ce « Focus » au milieu d’un set de The Chemical Brothers. Aucune idée d’où Frank est allé dégotter cet a cappella rappé de malade, mais il colle à la perfection à son groove sur ressort, inarrêtable hymne en puissance à la folie des corps. Pump up the voluuuuume !!

Inarrêtable. Unstoppable en anglais. C’est aussi le titre du nouveau single de Bad Rescue, et c’est clair qu’il ne faudrait mieux pas se dresser sur son chemin. Armé d’une production massive et d’un son coup de boule, « The Unstoppable » devrait sans nul doute décoiffer plus d’un·e fan de metal. Le nouveau projet des frères Potvin (One-Way Mirror, Lyzanxia…) collabore à nouveau avec un rappeur et un chanteur étrangers, Dogman Rukus et Mr Maph, pour accoucher d’un morceau, toujours aussi efficace et calibré pour les foules, qui rappellera les grandes heures de groupes comme Clawfinger, Skindred ou Faith No More à tous·tes les ex-fans des 90s.

On termine avec une belle découverte. Bordel Léon a sorti son premier EP en décembre dernier et on les rencontrera bientôt sur scène lors du prochain On Stage au Joker’s Pub. Le quartet tient une formule peu commune : un chant très marqué « rock alternatif » (on reconnaît quasiment les accents de Manu Chao période Mano Negra dans l’excellent « Allez » ci-dessous) associé à une instrumentation très blues-punk du bayou capable d’explosions absolument jubilatoires. On vous donne donc rendez-vous sur la piste du Joker’s le 20 mars prochain pour une bonne séance de jerks endiablés.

Rédaction : Kalcha